Modèle économique d'un Café de réparation
La dimension réelle du modèle économique
Nous allons reprendre dans cette section l'ensemble (le plus exhaustif possible) des possibilités qu'un porteur de Café de réparation (Repair'Café) peut envisager de développer au sein de son lieu. Cela ne signifie pas que toutes les composantes doivent être mises en œuvre. Au contraire, une approche "à la carte" peut être privilégiée et permettre ainsi la prise en compte du contexte propre du lieu.
Quelle est la proposition de valeur d'un Café de réparation ?
- Le visiteur vient dans un Café de réparation pour différentes raisons, principalement liées au fait que :
- il n’a pas les compétences nécessaires pour réaliser la réparation lui-même
- il n’a pas le matériel nécessaire
- il l’objet qu’il apporte n’est pas économiquement réparable (le coût de la réparation est trop élevé par rapport au prix d’achat neuf)
Ce à quoi l’offre d’un Café de réparation répond parfaitement. Celui-ci offre, de manière gratuite ou pour un prix désiroire, la possibilité de faire examiner l’objet par des personnes compétentes et d’en être le co-réparateur, d’acquérir des connaissances techniques et d’avoir accès au matériel nécessaire, le tout dans une ambiance conviviale propice à l’échange.
- Le réparateur bénévole, lui, vient au Café de réparation car il veut se rendre utile aux autres pendant son temps libre en partageant ses savoir-faire. Sa présence traduit aussi l’envie d’apprendre et d’acquérir de nouvelles connaissances au contact des autres réparateurs bénévoles. Il s’investit également dans le but de rencontrer d’autres personnes de son quartier, faire partie d’une communauté partageant des valeurs similaires.
Le Café de réparation lui donne alors l’opportunité de mettre en pratique ses savoir-faire techniques et surtout de leur redonner de la valeur. En effectuant ce précieux don de connaissances, le réparateur bénévole exprime son potentiel “dormant” et valorise ses compétences. Le Café de réparation lui permet aussi de faire des rencontres et d'apprendre au contact d'autres bénévoles.
Pour résumer, la proposition de valeur d’une Café de réparation serait la suivante : Offrir des moments d’échange gagnant-gagnant autour de savoir-faire manuels à travers la réparation collaborative d’objet du quotidien.
Qui sont les bénéficiaires directs du lieu?
Les bénéficiaires directs d’un Café de réparation sont les visiteurs et les réparateurs bénévoles. Ce sont eux qui expérimentent ces moments et bénéficient donc directement de l’offre énoncée plus haut. Évidemment, il existe une multitude d’acteurs bénéficiant également (mais de manière indirecte) de l’activité d’un Café de réparation. Ils sont répertoriés dans la partie “Impacts indirects d’un Café de réparation”.
Plus précisément, le visiteur est potentiellement toute personne souhaitant réparer un objet endommagé. Les profils sont très variés: toutes les tranches d’âges sont représentées, toutes les catégories socio-professionnelles car les valeurs défendues par le Café de réparation peuvent être partagées par tous.
Un réparateur bénévole est potentiellement toute personne souhaitant partager et transmettre son savoir-faire et ses connaissances en matière de réparation. Les compétences des réparateurs bénévoles leur viennent par exemple de leur grande expérience (personnes âgées), de leur goût prononcé pour la “bidouille”, le Do It Yourself (bricoleurs), de leur passion pour la technologie (geeks), de leur métier (artisans, métier manuel, etc) ou de leur formation (jeunes apprentis, étudiants en formation technique, etc).
Ce qu'on y fait, ce qu'on y trouve
Accueil et orientation
Témoignage du Repair'Café Paris (2014)
- Page dédiée au Repair'Café
Dans un Café de réparation, on est d’abord accueilli à l’entrée. Le membre du staff organisateur remet en général une fiche de réparation et oriente la personne vers l’atelier adéquat. En effet, l'espace dédié au Café de réparation est divisé en plusieurs ateliers thématiques. Les ateliers les plus courants sont :
- Appareils électroniques (ordinateurs portables, console de jeu, téléphones portables, etc)
- Petites appareils électroménagers (aspirateurs, micro-ondes, mixeur, etc)
- Jouets
- Meubles
- Vêtements et accessoires
- Vélos
Diagnostic et empowerment
Chaque atelier réunit autour d'une table un ou plusieurs réparateurs dotés de leurs savoir-faire et des outils adaptés. Une fois le problème expliqué et le diagnostic réalisé, la tentative de réparation peut commencer. Le réparateur va expliquer et montrer au visiteur comment s’y prendre. Le visiteur est co-réparateur puisqu’il est systématiquement associé à la réparation, à des degrés divers suivant les situations. Globalement, le but est de faire en sorte que le visiteur puisse réaliser lui-même la réparation et sache le refaire seul à l’avenir et ainsi former/aider une ou plusieurs personnes à son tour. Ce processus d’empowerment est essentiel pour un Café de réparation : il s’agit de faire monter les personnes en compétences, de leur redonner du pouvoir sur leurs objets, de se les réapproprier. L’utilité sociale d’un Café de réparation est alors optimale.
Pour faciliter le processus, le réparateur bénévole proposera automatiquement au visiteur de l’aider. De plus, une table de réparation collective est généralement prévue pour inciter les visiteurs à réparer eux-même leurs objets grâce aux conseils du réparateur bénévole.
Espace café
Un Café de réparation dispose d’un coin où tous les participants peuvent trouver à boire et de quoi se restaurer. Cela permet à chacun de faire une pause, de rencontrer les autres participants, de discuter, de tisser des liens.
Documentation & conseils
Le visiteur doit pouvoir effectuer des recherches s’il n’a pas toutes les informations dont il aurait besoin. S’il lui manque des informations sur son objet, s’il souhaite savoir s’il existe des endroits où son objet pourrait potentiellement être examiné par un expert, s’il existe sur internet un tutoriel pour effectuer la réparation que lui conseille le réparateur bénévole...dans tous ces cas et bien d’autres encore, il pourra trouver différentes ressources dans cet espace. Il peut également s’informer sur les évènements et organisations proches du Café de réparation.
Concrètement, ce poste sert à :
- mettre à disposition divers documents utiles tels que des guides pratiques de réparation, bonnes adresses des artisans et experts des alentours
- disposer d’un accès à internet via ordinateur portable pour consulter divers sites utiles : sites de réparation, sites des fabricants, adresse d’un réparateur professionnel proche...
- promouvoir et faire connaitre les associations et structures amies, les partenaires, d’autres initiatives partageant les mêmes valeurs mais ayant choisi un autre angle d’attaque...
Espace enfants
Même si les enfants sont vivement encouragés à observer et participer aux ateliers de réparation, le Café de réparation peut prévoir un espace avec des activités ludiques (jeux, arts plastiques…) et/ou liées au recyclage, à la récupération.
Pour cela, voici les activités clés à mettre en œuvre ainsi que les ressources nécessaires à ces activités (les ressources immatérielles sont en gras) :
Mettre à disposition des participants de l'outillage de base pour chaque type d'objet | * Les outils en question * La connaissance des acteurs du territoire : écoles, experts, commerçants, artisans acceptant de prêter leur matériel avec une contrepartie ou non * Des moyens financiers pour acheter éventuellement certains outils |
Réunir une équipe de réparateurs bénévoles, les coordonner et recenser leurs compétences | * Des ressources humaines : un coordinateur * Un réseau de proches, voisins, amis, collègues à qui demander s'ils sont intéressés pour participer * Une bonne connaissance du contexte local et des acteurs du territoire : réseaux de bénévoles, clubs d'informatique, boutiques de dépôt-vente, recycleries, ressourceries, établissements scolaires techniques, foyers socio-culturels, réseaux d'habitant de quartiers, porteurs de projet de réinsertion sociale, ... |
Trouver le lieu qui accueillera le café de réparation | * Des ressources humaines : l'équipe organisatrice * Des contacts avec la municipalité et les structures disposant de salles telles que les MJC, les foyers socio-culturels, les centres culturels, les établissements scolaires ... * Un climat de confiance afin bénéficier d'un local à titre gracieux de la part d'un partenaires ou même d'un visiteur ou d'un réparateur * Des moyens financiers pour l'éventuelle location de l'espace |
Planifier l'ouverture du Café de réparation (forme ponctuelle ou permanente, fréquence, durée) | * Des ressources humaines : équipe organisatrice |
Le jour J : superviser le bon déroulement de l'évènement, vérifier que chacun est à son poste et que les visiteurs sont pris en charge, qu'il ne manque rien, etc | * Des ressources humaines : équipe organisatrice * Des capacités organisationnelles, leadership, capacités d'écoute, polyvalence, proactivité |
Le jour J: animer l'espace café-restauration (parfois appelé "CaféThéRiante") | * Des ressources humaines : environ 2 bénévoles * Moyens financiers pour l'achat des fournitures alimentaires * Tables, chaises, assiettes, gobelets ... * Un véhicule pour le transport des fournitures * Un local de stockage |
Le jour J : faire vivre les différents ateliers et espaces | * Des ressources humaines : 1 ou 2 bénévoles par stand * Des ressources immatérielles: connaissances en bricolage, savoir-faire techniques et manuels, qualités de pédagogue pour transmettre ses savoirs, goût des autres, culture DIY, connaissances en électronique, couture, cycles... |
Gérer la relation avec les différentes parties prenantes : - administrer le site web - mise à jour des réseaux sociaux - communiqués de presse - publicité et promotion grand public - Information des bénévoles et retours d'expérience |
* Des ressources humaines : coordinateur(-trice), personne(s) chargée(s) de la communication, des relations externes * Des compétences en communication, marketing * D'excellentes capacités relationnelles * Aide de l'Association Stichting Repair Café |
La valeur clé du Café de réparation réside dans l'immatériel !
Comme le montre bien le tableau précédent, les ressources clés sur lesquelles s’appuie un Café de réparation sont essentiellement immatérielles, tout comme chacun des modules d’un tiers-lieu (FabLab, espace de co-working, incubateur, HackerSpace, MédiaLab…).
Elles peuvent être classées en trois catégories, de la manière suivante :
Compétences en bricolage, DIY Connaissances en électronique, couture, cycles… Compétences marketing et communication Culture geek Connaissance des acteurs territoriaux Expérience des participants |
Polyvalence Leadership Proactivité Soutien de l'association Stichting Repair Café |
Qualité et étendue du réseau de connaissances (amis, famille, voisins, pouvoirs publics, entreprises, associations, etc) Goût des autres Capacités relationnelles Capacité à fédérer autour de son projet Pédagogie pour transmettre ses savoirs |
L’utilisation de ces ressources immatérielles fait émerger au sein du Café de réparation une valeur également immatérielle considérable.
- Cette valeur réside, d’une part, dans l’offre proposée aux bénéficiaires directs. Le visiteur y gagne son propre empowerment, c’est à dire sa capacité à reprendre du pouvoir pour agir lui-même sur les objets, se les réapproprier (nécessaire dans un contexte où les objets sont faits pour rester entre les mains des fabricants et où les individus n’ont presque plus d’emprise sur leur cycle de vie). Or ce gain est de nature intangible et n’est pas uniquement lié à un produit matériel ou à un service rendu. La preuve en est que même si la réparation a échoué, son passage au Café de réparation lui aura toujours permis d’acquérir quelque chose de l’ordre de l’intangible, tels que des conseils, des connaissances, des relations, l’impression d’avoir vécu une expérience inédite, des questionnements, le renforcement de sa curiosité, une prise conscience, etc. Le réparateur bénévole, lui, gagne une forte revalorisation de ses compétences, savoir-faire et connaissances et par extension, de lui-même ainsi qu’une satisfaction personnelle d’avoir transmis et appris quelque chose aux autres.
- Cette valeur réside, d’autre part, dans les nombreux impacts positifs indirects de l’existence même d’un Café de réparation. La préservation de l’environnement grâce à sa contribution à la réduction des déchets, la création d’une dynamique territoriale, de lien social et intragénérationnel, la sensibilisation aux modèles collaboratifs et aux valeurs de partage, entre autres, sont autant d’exemples d’impacts réels positifs qu’a un Café de réparation sur son écosystème. Or dans l’état actuel de nos sociétés (dégradation environnementale, perte de lien social, isolement,...), impacter positivement son milieu grâce à son activité est une manifestation certaine de création de valeur.
Impacts indirects d'un Café de réparation
Un Café de réparation génère bien évidemment des impacts directs (c'est-à-dire directement reliés à la proposition de valeur et donc touchant les bénéficiaires directs). Par ailleurs, un Café de réparation génère également des impacts indirects non intentionnels sur des acteurs qui dépassent le cadre strict des bénéficiaires directs du lieu (concept d'externalités). Ce sont ces derniers qui sont ici décrits. Ils sont clés, notamment dans la construction d'un modèle économique durable innovant.
Municipalité | Réduction des déchets et des coûts liés à leur gestion Création de lien social, intergénérationnel sur le territoire Sensibilisation des habitants à la protection de l'environnement Valorisation de la commune d'implantation (puisqu'elle a rendu possible et soutient cette initiative qui s'inscrit dans un développement durable) |
|
Personnes ayant des savoir-faire techniques (professionnels ou amateurs) | Revalorisation de leur compétences, reconnaissance de leur valeur, de leur utilité et d'eux-mêmes | |
La société en général | Augmentation du nombre de personnes ayant savoir-faire manuels qui s'avèrent précieux | |
Réparateurs professionnels | Promotion de l'activité du réparateur, hausse de son chiffre d'affaire, création d'emploi | Baisse du chiffre d'affaire car baisse des clients |
L'environnement et par conséquent la société | Diminution de la pression sur les ressources naturelles (via baisse du taux de renouvellement des objets) | |
FabLab, la communauté des "makers" et du Do It Yourself (DIY) en général | Meilleure notoriété, hausse de la fréquentation grâce à une collaboration pour créer sur mesure des pièces nécessaires à la réparation des objets | |
Ressourceries | Meilleure notoriété, hausse de la fréquentation grâce à une collaboration | |
Établissements scolaires professionnels | Opportunités d'implication des élèves dans un projet concret, de mettre en œuvre leurs compétences, valorisation de l'établissement | |
Fabricants d'objets | Incitation à éco-concevoir ses produits, à les rendre réparables par les utilisateurs, voire à repenser son modèle économique | Baisse du chiffre d'affaire car baisse des ventes |
Association Stichting Repair Café | Meilleure notoriété grâce à l'affichage de l'affiliation | |
Membres de l'équipe organisatrice du Café de réparation | Développement de leur réseau, acquisition de compétences organisationnelles/managériales/relationnelles | Moins de temps pour s'investir sur d'autres projets |
Organisations amies, partenaires, associées | Développement et impact plus importants, meilleure notoriété, hausse du nombre de bénévoles | |
Sites web liés à la réparation | Hausse de la fréquentation du site, hausse des revenus publicitaires (s'ils existent) |
Cassons le mythe : la productivité est finalement un concept simple... ou pas...
Afin de fonctionner plus efficacement, un Café de réparation peut jouer sur plusieurs leviers. En effet, il peut faire des économies de 3 sortes :
- Économies d’adoption : économies basées sur l’expérience, la répétition
Exemple 1 : plus le visiteur fréquente le Café de réparation, plus il deviendra agile avec ses mains, adoptera l’état d’esprit « Do It Yourself », et plus il sera possible qu’à son tour, il devienne un réparateur bénévole et ainsi la communauté s’auto-alimente. Il s’agit alors de favoriser cette habitude de fréquentation du Café de réparation en lui faisant pleinement ressentir les bénéfices de son passage (via un accueil chaleureux, une fiche de réparation/satisfaction pour formaliser le bénéfice économique, etc) et en l’incitant à revenir (via l’affichage, les discussions, etc).
Exemple 2 : plus l’équipe organisatrice organise des Cafés de réparation fréquemment, plus elle sait comment s’y prendre et plus les activités préparatoires sont rapides et faciles.
Exemple 3 : plus un réparateur bénévole pratique la co-réparation d’un objet, plus il sait comment le faire, l’expliquer et guider le visiteur-apprenti de manière efficace.
- Économies de complémentation : économies basées sur la complémentarité des offres qui existent entre les acteurs qui entourent le Café de réparation
Exemple : Le fait de s’associer avec un FabLab afin de fabriquer sur mesure des pièces permet de profiter des compétences de la communauté des makers c'est-à-dire d’avoir accès à de nouvelles ressources immatérielles. Cette association peut prendre la forme d’un prêt des machines, d’une formation à leur utilisation, de la présence d’un membre du FabLab à chaque Café de réparation.
- Économies d’intégration : basées sur l’encastrement des processus de structures différentes (logique du 1+1 = 3)
Exemple : Le fait d’implanter le Café de réparation directement au sein de lieux où a un vivier de ressources autant matérielles qu’immatérielles (établissement scolaire technique, atelier d’un artisan, centre socio-culturel, antenne d’un réseau de recyclage…) permet d’intégrer les process de l’un à ceux de l’autre et vice versa. L’imbrication du Café de réparation et d’une autre entité permet d’optimiser leurs process respectifs (utiliser les « déchets » de l’autre comme une ressource: Cradle to Cradle, etc).
Globalement, le fait d’intégrer le café de réparation à un tiers-lieu disposant d’autres modules permet de bénéficier de sa dynamique globale, de ses ressources physiques, de sa communauté, du savoir des concierges (ou hosts). Les synergies entre les modules d’un tiers-lieu permettent de démultiplier l’efficacité de celui-ci. Nous explorons ce sujet dans la page dédiée à ces synergies.
La dimension économique et financière du modèle économique
La dimension économique et financière est une composante essentielle dans un modèle économique, puisque sans modèle viable, un Café de réparation ne peut être pérenne.
Voir aussi les modèles économiques des Tiers Lieux
Quels sont les centres de coût d'un Café de réparation ?
Un Café de réparation n’engendre pas des coûts très importants. En voici la preuve :
Les principaux coûts fixes sont :
- la location de l’espace (mais il s’agit souvent d’un prêt)
- la connexion internet (peut être incluse dans le prêt de l’espace)
- amortissement des investissements d’outillages
- impression du matériel publicitaire
- rémunération éventuelle d'une ou plusieurs personnes de l'équipe organisatrice (ce qui n'est pas le cas à ce jour)
Les principaux coûts variables (c'est-à-dire qui varient en fonction de l’activité du café de réparation) sont :
- Achat des fournitures alimentaires
- Approvisionnement du stock de matériel de réparation
- Eau et électricité
Quels sont les besoins de financement d'un Café de réparation?
Au démarrage, les besoins de financement sont les suivants :
- Location de l'espace
- Ameublement (tables, chaises, …)
- Outillage (machine à coudre, perceuse, tournevis, etc…)
- Matériel de réparation (stock, fil à coudre, colles, etc…)
- Pièces de rechange
- Matériel de décoration de la salle
- Cotisation à l’association Stichting Repair Café (optionnelle, 35€)
...et surtout du temps pour mettre en place les premières activités clés du démarrage (partenariats, bénévoles, trouver où s'approvisionner en matériel, etc).
Un Café de réparation ne nécessite donc pas un investissement de départ très élevé. En effet, un des grands avantages du Café de réparation est que le lieu peut aisément faire l'objet d'un prêt gratuit ou d'un échange dans le cadre d'un partenariat avec un établissement public (collège/lycée, MJC...). Les membres de la communauté de départ sont également souvent force de proposition et n'hésitent pas à faire marcher leur réseau pour trouver un espace à moindre coût. Quant au matériel et à l'outillage, le café de réparation peut facilement se les procurer grâce à des dons en nature des membres de la communautés, des prêts, la récupération aux encombrants ou l'achat à très faible coût dans un vide grenier, entre autres.
Si ces moyens s'avèrent insuffisants pour obtenir de quoi lancer le café de réparation, il peut être envisageable de faire appel au financement participatif à l'échelle du territoire concerné et de mener une petite campagne de levée de fonds auprès des citoyens en tant que futurs bénéficiaires des impacts positifs du Café de réparation.
Il est également possible de démarcher des sponsors tels que des grandes enseignes de bricolages.
Un autre levier de financement reste le soutien de la municipalité à travers une bourse pour les projets innovants à fort impact social et/ou environnemental.
Quels sont les centres de revenus d'un Café de réparation?
Les approches classiques
Les sources de revenus de nous allons voir ici sont dites « classiques » car ce sont celles qu’utilisent actuellement les Cafés de réparation. La plupart du temps, les Cafés de réparation font appel à la fois à des contributeurs publics et privés (modèle hybride). En effet, il est rare qu’il ne dépende à 100% des fonds publics ou à 100% de fonds privés. Cependant, rare également sont ceux dont le flux de revenus provient de toutes les sources listées ci-dessous.
• Revenus issus de la sphère publique
- Dotations des ministères (développement durable, …)
- Dotations des conseils régionaux
- Dotations des départements
- Dotation de la commune d’implantation
• Revenus issus de la sphère privée
- Cotisations des membres (s’il s’agit d’une forme associative)
- Dons via une tirelire à pourboire
- Autres dons de particuliers, d’entreprises, etc
Ces sources de revenus classiques, reposant en majorité sur des mécanismes de subventions et de dons, posent deux problèmes.
• Le premier est que les subventions publiques ne sont pas abondantes et ont même tendances à diminuer, en particulier en période de crise. Il est donc dangereux pour la pérennité du Café de réparation de compter majoritairement sur celles-ci. De plus, n’étant pas conditionnées à un résultat précis, cela ne permet pas à l’organisme public de prendre réellement conscience des bénéfices de l’action menée par le Café de réparation.
• Le deuxième problème du modèle économique actuel des Cafés de réparation est que ses revenus ne correspondent pas à la création de valeur réelle du Café de réparation : il génère peu de revenus par rapport à son activité. Ces revenus permettent souvent simplement au Café de réparation de couvrir ses coûts. Ils ne reflètent donc pas avec justesse tout la création de valeur d’un Café de réparation. Il faut donc chercher à monétiser ses impacts positifs !
Les approches innovantes
Le Café de réparation est un module de tiers-lieu relativement peu gourmand en investissement de départ. Ainsi, les solutions innovantes que nous allons développer ici ne sont pas tournées sur l’aspect « levée du capital de départ » mais plutôt vers la recherche de nouvelles sources de revenus. Certaines de ces nouvelles sources proviennent de solutions assez simples alors que d’autres, plus complexes, s’attachent à monétiser la valeur créée par le Café de réparation au cours de son activité puisque, comme décrit plus haut, l’existence d’un tel lieu sur un territoire donné impacte, largement positivement, un grand nombre d’acteurs.
• Instaurer un prix d’entrée : il pourrait être demandé aux visiteurs une somme modique (2€ par exemple) pour pouvoir entrer dans le Café de réparation.
• Conditionner la participation à la réussite : il pourrait être demandé aux visiteurs de donner une somme modique (3€, 5€…) si la réparation est réussie. Cela est déjà mis en place dans le Repair Café de Saint-Egrève dans l’Isère.
• Initier la mise en place d’un système d’échange local (SEL) : Un SEL permet à tout individu d'échanger des compétences, des savoir-faire et des produits avec les autres membres du groupe via une unité d’échange. Ainsi, le Café de réparation se prête particulièrement bien à cette démarche puisque c’est précisément un lieu d’échange. Ainsi, il est tout à fait envisageable que le réparateur bénévole gagne des unités en participant au Café de réparation (il choisit de mettre ses compétences au service des autres et de transmettre ses savoirs) et que la personne qui amène son objet dépense des unités. Ainsi, intégrer le Café de réparation à un SEL permet de rester hors du système monétaire classique et de garantir la gratuité, souvent chère aux porteurs de projet de Café de réparation. Celui-ci peut se concentrer sur les autres sources de financement sans avoir recours à l’une des deux solutions précédentes.
• Répondre aux appels à projets innovants et à impact social ou environnemental : il existe de nombreux appels à projets innovants et concours, autant locaux que nationaux. Ils peuvent être à l’initiative de municipalités (par exemple l’appel à projets innovants de la Ville de Paris), des Conseils régionaux (par exemple le Programme de soutien aux projets socialement innovants de la région Ile-de-France – économie locale et collaborative), de fondations d’entreprises (par exemple les Prix et Trophées de l’initiative en économie sociale de la Fondation Crédit Coopératif), par des instances européennes (par exemple le Concours européen de l’innovation sociale), des entreprises (le programme Impact d’Ashoka), et bien d’autres encore. Ils permettent d’augmenter sa visibilité et d’espérer gagner soit un soutien financier soit un accompagnement personnalisé, un coaching.
• Collecter et revendre de manière autonome : le Café de réparation est régulièrement confronté à des situations où les personnes ne veulent plus de leurs objets et aimeraient les lui laisser. Si les équipes constatent que la demande est bien présente, les réparateurs bénévoles pourraient prendre en charge eux-mêmes la réparation de ces objets et les revendre ensuite à un prix modique aux prochains Cafés de réparation.
• S’intégrer à une antenne d’un réseau de réparation ou de recyclage : le Café de réparation pourrait se greffer directement à une Ressourcerie, un atelier du réseau Envie ou Eco-systèmes. Ces structures récupèrent divers types d’objets, qu’ils soient en état de marche ou non, les réparent et les revendent ou les recyclent. Elles pourraient alors ouvrir leurs portes au public de temps en temps sous la forme d’un Café de réparation afin d’intégrer la dimension collaborative à leur modèle et de bénéficier de ses impacts positifs. Les coûts du Café de réparation sont alors pris en charge par la structure, ce qui est avantageux.
• S’adosser à un établissement scolaire : le Café de réparation pourrait se tenir au sein d’un l’établissement scolaire formant à des métiers manuels et faire participer les élèves en tant que réparateurs. Le coût de la réparation, conditionnée à la réussite, serait bien inférieur au prix du marché mais, permettrait par exemple d’en donner une partie à l’élève réparateur lui-même. Le principe de Café de réparation est inchangé, chaque élève possède ses propres spécialités, la diversité des compétences est maintenue, le visiteur est toujours incité à co-réparer. Le café de réparation pourrait alors faire l’objet de travaux dirigés (TD) réguliers et donc s’insérer dans le cadre des enseignements ou bien être une activité optionnelle pour ceux que cela intéresse.
• Etablir un contrat avec la municipalité : loin de la simple idée de subvention, un contrat avec la municipalité pourrait prévoir que celle-ci verse au Café de réparation un montant proportionnel à la masse d’objets réparés. L’idée est d’obtenir une juste rétribution de la part de la municipalité pour le rôle social et environnemental que joue le Café de réparation sur son territoire, ce qui serait une forme de reconnaissance de son utilité publique. Dans la pratique, la masse des objets réparée serait obtenue en pesant tous les objets réparés à leur sortie du Café de réparation, avec comme preuves les fiches de réparation remplies par les visiteurs, et enregistrées dans un fichier prévu à cet effet.
• S’associer à une grande enseigne de bricolage ( Mr.Bricolage, Leroy Merlin, Weldom, Castorama, Brico-dépôt, Bricmarché, Bricorama…) : le Café de réparation se tiendrait au sein même d’un magasin de bricolage implanté sur la commune. Il peut y avoir différents cas de figure.
Une possibilité serait que le Café de réparation soit principalement rémunéré en nature et bénéficie du soutien logistique et promotionnel du magasin, mais aussi de ses produits (outils, matériaux…).
Une autre option, plus innovante mais aussi surement plus intéressante pour le Café de réparation, serait d’être rémunéré par session organisée dans le magasin, en tant que prestataire d’un atelier de réparation. Le magasin offre ensuite ce service à ses clients de manière gratuite. La rémunération de cette réparation peut soit être redistribuée aux réparateurs soit alimenter le fonds de roulement du Café de réparation.
Dans tous les cas, cela constitue une animation, une activité ludique au sein du magasin et cela permet d’attirer les clients, de promouvoir l’activité de l’enseigne tout en mettant en valeur des individus et leurs savoir-faire, les bénéfices de la collaboration (convivialité, apprentissage, complémentarité).
• S’intégrer à un tiers-lieu comportant d’autres modules (HackerSpace, Fablab, coworking…) : un café de réparation peut beaucoup apporter à un tiers-lieu multi-modulaire mais à aussi beaucoup à gagner. S’il est ponctuel, il constitue un évènement convivial pour attirer des citoyens dans un lieu qu’ils n’ont pas forcément l’habitude de fréquenter et contribue à l’élargissement de la communauté du tiers-lieu. Par ailleurs, le café de réparation peut bénéficier du gisement de ressources matérielles et immatérielles présentes dans le tiers-lieu: équipements du FabLab, expériences et réseau des co-workers, équipe de l’incubateur durable, matériel vidéo du MédiaLab. Le café de réparation est alors dans un écosystème très favorable pour mener à bien sa mission et toucher un public encore plus large qu’à l’habitude.
Remerciements
Un grand merci à Jaime Arredondo et Fransiska Groenland, fondateurs du Repair Café Nice et Philippe Caner, fondateur du Repair Café Sophia pour leur aide, leur temps, la relecture et les discussions très intéressantes !