ANIS, de l’internet solidaire vers l’innovation sociale numérique

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Une histoire de l'ANIS par E.Vandamme.

(0.1) D’un tiers-lieu à l’autre[modifier | modifier le wikicode]

Roubaix, 2001 : la coopérative INSITE est installée dans un hôtel d’entreprises d’un des quartiers prioritaires de ce territoire alors en pleine reconversion et accueille dans ses locaux plusieurs projets d’économie sociale et solidaire touchant au numérique. Un appel à projet du secrétariat d’Etat à l’économie solidaire constituera le déclic pour passer à l’action et créer une structure dédiée à l’accompagnement de ces projets : l’Association Nord Internet Solidaire. Avec un projet phare : la création d’une Ecloserie de projets numériques socialement innovants, un tiers-lieu avant l’heure, arrivé trop tôt et qui fera long feu mais qui restera une étape déterminante dans le projet ANIS.

Lille, 2011 : ANIS amorce un virage important en se renommant Association Numérique et Innovation Sociale, puis en quittant Roubaix pour rejoindre la dynamique de Coworking Lille, qui donnera lieu au Mutualab, le principal tiers-lieu lillois. C’est à la même époque qu’émerge le réseau Catalyst, collectif d’acteurs de l’innovation sociale numérique qui regroupera bientôt une soixantaine de personnes et structures dans un projet horizontal, et pour lequel ANIS joue un rôle de structure d’appui.

(0.2) De l’internet solidaire vers l’innovation sociale numérique[modifier | modifier le wikicode]

Dans ce mouvement de l’internet vers le numérique, de l’ESS vers l’innovation sociale, d’un lieu d’accompagnement de projets à un collectif auto-apprenant, l’histoire d’ANIS illustre une évolution de la prise en compte de l’interaction entre les technologies et la société, en particulier dans le monde associatif et de l’éducation populaire.

Aujourd’hui, en 2017, ANIS entame une troisième période de son vie en mettant en oeuvre sa propre transition, en inventant de nouveaux modes d’organisation, de gouvernance, de production collective, en s’affirmant comme un lieu de passage entre communautés d’innovateurs sociaux et acteurs du territoire.

ANIS a évolué des usages des « Technologies de l’Information et de la Communication » (TIC) à la question des transformations sociales accompagnées par le numérique, elle est passée d’un objet associatif numérique à un objet associatif sociétal, et travaille désormais sur le numérique parmi d’autres sujets : la transition, les communs, les logiques de contribution, la réflexion sur de nouveaux visages de la valeur.

(1) ANIS 1.0 : Association Nord Internet Solidaire[modifier | modifier le wikicode]

ANIS est une association Loi 1901 agréée Education Populaire qui a pour objet la valorisation, la réflexion et l’animation autour du numérique, de l’innovation sociale et des usages citoyens et solidaires des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC). Elle a été créée en juillet 2001 à Roubaix au sein de la coopérative INSITE, l’une des premières agences web française orientée vers le tiers secteur et les projets d’intérêt général. INSITE mène des projets web pour ses clients mais soutient ou porte aussi des initiatives qui sortent de ce cadre marchand, et qui risquent à terme de mettre en risque l’entreprise, dont la dimension coopérative a certes permis de sortir sans trop de dommages de l’explosion de la « bulle internet » de 2000 mais dont l’équilibre reste fragile.

Un Groupe de travail organisé en 2000-2001 par l’APES Nord-Pas de Calais (Acteurs pour une économie solidaire) sur le thème des « NTIC » confirme un besoin en terme de mutualisation, de mise en réseaux, de valorisation des valeurs sociales et solidaires des technologies de l’information.

L’appel à projet du secrétariat d’Etat à l’économie solidaire orienté notamment vers l’internet solidaire et porté par Guy Hascoët alors élu vert de la ville de Roubaix, constituera l’opportunité de passer à l’action, créer une association et lancer une activité d’accompagnement de ces projets.

(1.1) Eclosion[modifier | modifier le wikicode]

Le projet est alors porté par Bruno Lefèvre, qui conçoit et anime l’Ecloserie des Arts (INSITE et ANIS sont hébergées rue des Arts à Roubaix) et rejoindra ensuite INSITE, par Emmanuel Vandamme, gérant et fondateur d’INSITE et par Bruno Villalba, maître de conférences Sciences Po Lille - Ceraps, qui prend la présidence de l’association.

Première initiative mise en oeuvre par l’ANIS, l’Ecloserie entend soutenir les porteurs de projets d’activités socialement utiles à vocation non commerciale utilisant les TIC dans une logique de croisement (encore rare à l’époque) entre l’économie solidaire et l’internet. 'Pour plus d’information sur le projet « Ecloserie des arts », cf. article de Bruno Villalba, ancien président d’ANIS et enseignant-chercheur au CERAPS, dans la revue Ecorev : http://www.ecorev.org/spip.php?article403'

L’Ecloserie des Arts a pour but d’accueillir et de réunir une dizaine d’acteurs régionaux et nationaux de l’internet solidaire, des acteurs sociaux, culturels, des porteurs de projets au croisement des TIC et de la solidarité. Ce lieu ressource offre un accompagnement logistique, administratif, de conseils, de formation, d’expertise de la part d’ANIS.

Comme le rappelle Bruno Villalba, « 'le projet part du constat que le développement de l’internet fait une part de plus en plus importante aux démarches consuméristes, alors que dès les premières heures de la vulgarisation de ces technologies, des activités non-marchandes ou ayant pour vocation première une réelle plus-value sociale ont émergé et se sont développées, qui méritent d’être mieux valorisées. L’objectif est que la technique et la culture de réseau soient exploités de manière collective et durable, avec des objectifs de solidarité, de construction collective, de mutualisation des connaissances, d’insertion sociale ou encore de développement culturel.' »

(1.2) Pivotement[modifier | modifier le wikicode]

Le projet d’Ecloserie ne survivra pas à un revirement de la Ville de Roubaix qui après avoir mis à disposition gracieusement des locaux magnifiques exigera un loyer en proportion que l’association ne peut assumer.

L’association, qui fonctionne alors grâce à un poste d’emploi-jeune, repositionne ses activités et trouve sa vitesse de croisière à partir de 2005 :

  • « 'Veille sur les usages émergents dans les domaines des TIC citoyennes et solidaires, en région Nord-Pas de Calais comme ailleurs ;'
  • 'Capitalisation et valorisation des initiatives innovantes et exemplaires en logique de centre de ressources ;'
  • 'Opérations ponctuelles de mise en lumière ou de mises en débats de sujets émergents, animation et mise en relation d’un réseau de personnes actives ou en veille ;'
  • 'Actions d’appui et de conseils ponctuels afin d’aider à la définition ou à la réalisation d’opérations de développement d’usages citoyens et solidaires des TIC ;'
  • 'Portage d’opérations visant à lancer ou mettre à l’agenda certains sujets (ex : le réemploi de matériel informatique avec Ordi 2.0, ASSOCLIC) ;'
  • 'Opérationnalisation de ces missions via un site web (www.anis.asso.fr), une newsletter mensuelle, des outils de réseaux sociaux (Facebook, Twitter), des événements (en particulier les ROUMICS - Rencontres Ouvertes du Multimédia et de l’Internet Citoyen et Solidaire – www.roumics.com). »'

Pendant cette période, ANIS aura mené des projets très différents, comme la conception et l’animation du site internet ressources www.ticassos.org, l’animation régionale du projet Ordi 2.0 avec la DUI (Délégation aux Usages de l’Internet au sein de l’Etat), le dispositif ASSOCLIC Nord-Pas de Calais, la réalisation de formations en direction d’acteurs éloignés des TIC, l’organisation des événements ROUMICS sur des sujets en phase avec les réalités numériques et sociétales tels que « Ruralité et TIC », « Seniors et TIC », « Place des femmes dans l’informatique », « Education Populaire et TIC », « Insertion professionnelle et TIC », etc.

(1.3) Internet solidaire et fracture numérique[modifier | modifier le wikicode]

Nous sommes à une époque où les acteurs d’un internet « citoyen et solidaire », d’un « web indépendant » et d’un internet « non marchand » sont en train de se structurer, de VECAM (http://vecam.org/archives/article326.html) à Altern, de Gandi au minirézo (http://www.uzine.net/article22.html) en passant par Globenet, la communauté SPIP et la coopérative d’hébergement Ouvaton. Des initiatives locales se font jour, comme à Brest avec Michel Briand, à Bordeaux avec Média-Cité qui organisera les premières REMICS, inspiration pour les ROUMICS, Rencontres ouvertes « du multimédia et de l’internet citoyen et solidaire » qu’ANIS anime depuis 2005.

En parallèle de ces initiatives militantes pour un numérique ouvert créatif et inclusif, les acteurs publics se forgent leur propre doctrine. En 2000, le G7 définit comme l’un de ses principaux objectifs le développement de la société mondiale de l’information (global information society) et crée la Dot Force pour intégrer les efforts internationaux, et trouver les moyens efficaces de réduire la « fracture numérique » considérée comme l’inclusion ou l’exclusion des avantages de la société de l’information, comme le rappelle 'Kemly Camacho dans son article « fracture numérique » du recueil « Enjeux de mots » édité par VECAM : http://vecam.org/archives/article548.html'

C’est la grande époque des dispositifs de « réduction de la fracture numérique » tels que les Cyberbases de la Caisse des dépôts ou de l’opération Cyber Nord Pas de Calais, « 'label régional, destinée à donner accès et sensibiliser à l’informatique et internet les publics les plus éloignés' » lancé en 1998.

ANIS se retrouve en partie dans cette logique d’« e-inclusion des publics éloignés », et participe ponctuellement à la dynamique régionale (animation de rencontres régionales, implication du réseau des EPN aux ROUMIS, diffusion de sa veille au réseau). L’association ne se situe cependant jamais comme tête de réseau et n’est pas avant tout perçue comme un acteur de la médiation numérique.

Née au sein d’une coopérative, l’association a sans doute hérité d’une culture de l’entrepreneuriat social qui l’amène à une certaine circonspection envers les politiques publiques sous-tendues par la vision réductrice de la fracture numérique qui se traduisent généralement dans des dispositifs généralistes et descendants. En préférant à cette époque le terme d’e-inclusion, ANIS cherche à se situer dans une logique constructive plus que réparatrice, dans un cadre de pensée laissant une place importante à l’initiative individuelle au service de l’intérêt général plutôt qu’à une action publique présupposant une absence de pouvoir d’agir de la part des habitants, vision dont certains lieux de médiation numérique sont encore prisonniers malgré eux.

(1.4) Indépendance et frugalité[modifier | modifier le wikicode]

Le fonctionnement de l’association lui permet également de disposer d’une certaines liberté de pensée et d’action. ANIS a toujours fonctionné avec un seul poste de coordination, occupé notamment Julie Bailleul de 2005 à 2015 qui a très largement contribué au succès du projet, d’abord en statut emploi-jeune puis en contrat de droit commun. Les 14 éditions des ROUMIS (qui ont rassemblé entre 60 et 300 personnes selon les années et les sujets) ont toujours été organisées avec des budgets de quelques milliers d’euros. ANIS est une structure frugale. L’expérience initiale de l’Ecloserie a amené les administrateurs à une certaine prudence envers les partenaires institutionnels. Frugalité et juste distance ont sans doute in fine permis de nouer des relations durables de confiance, notamment avec la Région Nord-Pas-de-Calais puis Hauts-de-France, avec la Métropole Européenne de Lille (MEL) et la Délégation aux Usages de l’Internet (feue DUI). Depuis le début des années 2010, après 10 années d’existence, ANIS est en effet devenue une structure reconnue, accédant plus facilement à des financements publics (au risque parfois d’une institutionnalisation difficilement compatible avec la culture des membres actifs).

(2) ANIS 2.0 : Association Numérique et Innovation Sociale[modifier | modifier le wikicode]

En 2011, ANIS fête ses 10 années d’existence, dans une ambiance de reconnaissance des acteurs institutionnels qui réaffirme l’utilité de la structure sur son territoire.

Le président de l’association Mohamed Bennabou, qui avait pris la suite de Bruno Villalba, est devenu élu au numérique à Villeneuve d’Ascq et souhaite passer la main. Emmanuel Vandamme est désigné président et propose de transformer le nom de « Nord Internet Solidaire » en « Numérique et Innovation Sociale ». En découvrant un nouveau sens à l’acronyme quoi lui sert de nom, l’association découvre un nouveau sens à son action - dans un environnement où l’innovation sociale a tendance à se banaliser et à parfois s’éloigner de ses visées initiales, et où le numérique est désormais évident, incontournable, omniprésent.

L’Assemblée Générale d’ANIS de juin 2011 permettra d’acter ces nouvelles orientations, elle renouvelle les membres fondateurs au sein du Conseil d’Administration et accueille de nouveaux acteurs provenant de secteurs d’activités tels que l’innovation sociale et numérique, l’Art numérique, la consommation collaborative, le coworking, l’Open Source.

ANIS a alors « 'pour objet d’envisager les enjeux de Société et d’analyser leur croisement avec le numérique. La structure positionne son action dans la dynamique d’économie contributive, d’intelligence collective, de production de biens communs.' » et définit son action comme se situant « 'au croisement de multiples thématiques : Innovation sociale, Innovation numérique, ESS, réemploi informatique, consommation collaborative, financement solidaire / crowdfunding, DIY / FabLab, nouveaux modes de travail / Coworking, Tiers-Lieux, Open Source, Open Data, éducation populaire, solidarité, citoyenneté…' »

L’action d’ANIS s’inscrit dans une dynamique territoriale, avec les acteurs du collectif Catalyst (cf. infra), mais aussi la MRES (Maison Régionale de l’Environnement et des Solidarités, http://www.mres-asso.org/), les réseaux d’EPN, les Centres Sociaux qui participent de plus en plus activement aux activités de l’association. ANIS apparait alors comme un centre d’échanges, un lieu de capitalisation.

(2.1) Mise à jour majeure[modifier | modifier le wikicode]

En passant de la promotion des usages citoyens et solidaires des TIC à l’innovation sociale et numérique, ANIS prend en compte le fait que de nouvelles façons de travailler et d’agir dans la société sont apparues, appuyées d’une part sur l’expérience de l’économie sociale et solidaire, de l’éducation populaire, des acteurs de la participation mais aussi sur le numérique, dans ses dimensions de transformation sociale.

« 'L’innovation sociale, passé d’une logique militante à une reconnaissance et une identification par le grand public apporte des solutions pragmatiques aux problèmes quotidiens des citoyens. »' affirme le texte d’orientation rédigé en 2011. « 'Le numérique quant à lui, à travers le Web 2.0, les blogs, les réseaux sociaux et la démocratisation des terminaux, touche aujourd’hui une large part de la population française. L’Internet devient un champ d’expérimentation et de déploiement de projets sociaux. »'

Au fur et à mesure des réflexions, des projets, des rencontres, des connexions évidentes sont apparues entre les différentes valeurs, sensibilités et thèmes de prédilection d’ANIS : convergence des dynamiques d’innovation sociale et des évolutions de société liées au numérique (innovation sociale numérique) ; convergences entre des thèmes tels que « Développement durable et numérique » ou « Economie Sociale et Solidaire et Logiciels Libres » ; nouvelles modalités d’entrepreneuriat, de travail (espaces de travail partagés, coworking), nouvelles modalités d’apprentissage notamment portées par les Makers, de consommation, de « mieux vivre ensemble » ; renforcement des notions d’intelligence collective, de travail collaboratif, de mutualisation, de co-construction, de co-élaboration ; enjeux des logiciels libres ; des « technologies de la relation » ; enjeux de l’ouverture des données publiques (Open Data) ; nouvelles dimensions culturelles des pratiques numériques, comme outils d’accès à la culture et aux savoirs, outils d’expression et de création, outils de mutualisation et de coopération tels que les FabLab…

Entre 2012 et 2015, les ROUMICS ont trouvé une nouvelle dynamique, en traitant de thèmes liés au nouveau positionnement de l'association et en touchant un public nouveau et nombreux :

  • l'innovation sociale numérique en 2012,
  • les tiers-lieux en 2013,
  • les biens communs en 2014 (avec la participation de Bernard Stiegler et Michel Bauwens),
  • la convergence entre transitions numérique et écologique en 2015.

(2.2) Des outils aux pratiques sociales[modifier | modifier le wikicode]

Le numérique apparait donc alors comme étant au cœur des processus d’innovation sociale, de nouvelles formes de travail et des dynamiques collectives de projets de territoires, il interroge ces nouvelles formes de collaboration, ces nouvelles expressions créatives, de nouvelles dynamiques de projets innovants. ANIS considère que « 'Les évolutions technologiques offrent de nouvelles perspectives pour répondre à des problématiques sociales, environnementales… Renforcés par des outils libres, ouverts, modulables, des usages inédits, pertinents, exemplaires, voient le jour (participation, collaboration, co-construction, Développement Durable, lien social, entre-aide, solidarité…).' »

Dans la culture d’ANIS à l’époque, il devient évident que le numérique ne peut se résumer ni à des outils techniques répondant à des enjeux économiques ni à un enjeu de rattrapage pour les publics les plus éloignés : le numérique, ce sont des outils, des usages, des services, mais surtout de nouveaux espaces sociaux qui émergent, de nouvelles pratiques qui transforment la société. Le numérique est un fait social qui nous amène à "'penser une société "avec le numérique", c’est‐à‐dire une société dans laquelle le numérique a d’ores et déjà pénétré la vie de la large majorité des populations, dans leurs sociabilités, leur travail, leurs loisirs, leurs activités collectives, etc.' comme le propose le Conseil National du Numérique dans son rapport de 2013 sur l’inclusion numérique.

(2.3) ANIS et les Makers[modifier | modifier le wikicode]

Cette appropriation relativement facile des outils, le "hacking", la capacité à bidouiller sont des facteurs de capacitation des citoyens mais aussi des professionnels. Ce sont des moyens des faire ensemble, de partage et de mutualisation. La philosophie des makeurs et des hackers, l'approche du design de service qui fait plus qu’émerger en 2011, rejoignent des fondamentaux de la pédagogie : faire plutôt que dire, mettre la pain à la pâte, éprouver pour comprendre.

Les activités d’ANIS de 2011 à 2016 accordent une place importante à la fabrication numérique comme nouveau véhicule d’éducation populaire numérique, d’abord avec une série d’ateliers dans les Centres Sociaux financés par la Fondation Orange, puis avec le projet Make-Make (make-make.io), soutenu dans le cadre de l’appel à projets pour des expérimentations en faveur de la jeunesse (FEJ) mis en œuvre par le Ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports.

Make-Make est un projet autour de la fabrication numérique à destination des 15 - 25 ans. Il comprend des ateliers découverte sur la Métropole Lilloise, ouverts à tous et gratuits, des semaines de formation intensive autour du numérique et de la fabrication numérique un site web pour informer, échanger et documenter des projets de fabrication numérique : impression 3D, construction de drones, de vélos, de capteurs citoyens (en lien avec le projet CitizenWatt).

Le projet vise des objectifs de connaissance des outils numériques, de développement du pouvoir d'agir, de travail collaboratif, d’insertion sociale et économique, d’innovation sociale et numérique par le développement de biens communs.

ANIS a impliqué dans ce projet des acteurs de l’éducation populaire (Centres Sociaux et MJC) en leur proposant d’accueillir des ateliers et de faire connaître le projet dans leurs réseaux. Le projet a aussi permis au réseau de Makers lillois de se structurer, non sans mal parfois, les tensions entre les pôles hobbyistes et pros étant parfois vives.

Sur cette période, ANIS a également été sollicitée par la Délégation aux Usages de l’Internet pour assurer une fonction de pôle ressource FabLab, un dispositif qui est devenu pôle ressources médiation numérique et a ramené, par le biais de la fabrication numérique, l’association sur ce champ qui n’était plus au coeur de ses préoccupations.

(2.4) Le collectif Catalyst[modifier | modifier le wikicode]

2011 est également l’année de la création en marge d’ANIS du collectif Catalyst, « laboratoire citoyen en innovation sociale à l’ère du numérique », ouvert à tous et regroupant aujourd’hui une centaine d’individus et de projets de la métropole lilloise.

Catalyst est une organisation informelle, dont ANIS assure le « back-office » administratif, en portant par exemple des demandes de financements.

Comme l’indique le premier document de description du projet (que l’on peut retrouver sur www.catalyst-initiative.org) « 'Le projet Catalyst consiste d’abord à écouter, à assurer une veille sur les besoins et les projets locaux représentatifs d’une forme d’innovation sociale. Il permet ensuite de restituer, d’échanger et de confronter avec ce qui se fait sur d’autres territoires en France ou à l’étranger. Enfin, il se veut expérimental : provoquer la rencontre entre différents univers, favoriser la créativité citoyenne et développer la coopération - notamment avec les outils numériques. Il donnera lieu à des prototypes de nouveaux services, d’organisation des acteurs locaux, de projets économiques et sociaux. (…)'  »

« 'Catalyst est représentatif du passage d’une société de la possession à une société de la relation, d’une économie financière à une économie sociale et solidaire. Le projet permet la coopération entre acteurs du numérique, de l’ESS, de l’écocitoyenneté, de l’Education Populaire…' »

La vocation de Catalyst est de participer au développement de l’innovation sociale sur le territoire et d’utiliser les technologies numériques pour donner à son action une grande réactivité et une capacité d’expérimentation à court terme.

Les membres du collectif Catalyst s’appuient sur des méthodes créatives et innovantes, collectives et interdisciplinaires. Il est influencé par les pratiques collaboratives du web (licences libres, «hacking» au sens positif, désintermédiation, coopération, etc.) '»'

En tant que laboratoire, Catalyst vise à mieux comprendre les nouveaux sujets émergents à l’ère du numérique et à favoriser leur appropriation par tous. En 6 ans, Catalyst et ANIS ont activement participé à l’émergence sur Lille et ses environs des sujets de consommation collaborative, de tiers-lieux, du mouvement des makers, des communs.

Chaque recherche consiste en :

1. Assurer une veille sur enjeux du moment et choisir une thématique à approfondir sur l’année (Veille mutualisée sur le site de l’ANIS)

2. Organiser des rencontres régulières pour permettre d’échanger sur ces sujets (Apéro Catalyst)

3. Soutenir en nature et financièrement les communautés ou les projets et expérimentations sur le sujet émergent (Soutien du collectif makers, du collectif des tiers lieux, soutien aux assemblées des communs, etc..)

4. Organiser une rencontre annuelle sur la question (participation aux Roumics) et permettre aux membres de Catalyst de participer aux rencontres d’autres territoires sur le sujet (Forum des usages coopératifs, etc…)

5. Assurer une écriture ou bilan sur les sujets (Bilan des Roumics + production de fiches, vidéo, documents).

6. Favoriser l’appropriation de ces travaux de recherche par tous, en particulier les acteurs du numérique, de l’ESS, de l’écocitoyenneté, de l’éducation populaire

En 2016, Catalyst a démarré une recherche ouverte sur les questions de financement et de rétribution dans les communs.

Le projet dispose d’un site web collaboratif (http://catalyst-initiative.org/) et de plusieurs espaces d’échanges : la liste de discussion Catalyst, la liste de discussion Coworking tiers lieux Nord de la France (issue de la recherche 2014), la liste de discussion des makers (issu de la recherche 2013), la liste de discussion financement dans les communs et la liste de discussion sur les communs (issu de la recherche catalyst 2015).

(3) L’ANIS engagée dans sa propre transition[modifier | modifier le wikicode]

L’expérience Catalyst a profondément réinterrogé ANIS, à la fois dans son objet et dans son organisation. Une série de rencontres de travail a été organisée fin 2016 et début 2017 pour réfléchir à cette évolution.

Deux propositions ont émergé. La première partait d’un constat de relative confusion entre les 2 projets ANIS et Catalyst, amenée par l’évolution d’ANIS vers des sujets de plus en plus orientés innovation sociale et de moins en moins médiation numérique, dans un contexte régional de rebond de la médiation numérique qui évolue vers des questions plus larges avec des enjeux sociaux plus spécifiques : accès à de nouveaux services collaboratifs, développement de pratiques de coopération à travers le numérique, gestion des données personnelles, prise en compte de la fabrication numérique, de l’internet des objets, formation au code, etc. : derrière tous ces usages se dessine l’évolution des EPN en tiers-lieu, en redéfinissant le lien avec les collectivités et les communautés.

Ce premier scénario consistait à repositionner ANIS sur un rôle de diffusion de la culture numérique à l’échelle régionale, en intervenant notamment auprès des acteurs de la médiation numérique, et de repositionner Catalyst comme laboratoire d’innovation sociale, « do-tank » qui expérimente de nouvelles pratiques d’organisation, de gouvernance, qui fait émerger des idées et des projets, à l’échelle métropolitaine. Ce scénario impliquait de redéfinir une offre de service lisible et correspondant aux besoins des acteurs, tout en poursuivant une gouvernance associative classique impliquant ces nouvelles parties-prenantes. Au delà des EPN, ANIS peut assurer un travail de diffusion de la culture numérique (notamment dans sa dimension de facteur d’innovation sociale) à l’échelle régionale, en travaillant avec les acteurs de l’éducation populaire, de la culture, de l’éducation. L’enjeu était de mieux articuler ANIS et Catalyst, dans lequel Catalyst jouait un rôle de tête chercheuse, d’avant-garde et ANIS un rôle de diffusion régional du travail de Catalyst.

La seconde proposition, qui a été finalement retenue par les membres actifs de l’association, consiste à « 'accompagner la société dans la transition numérique par la compréhension de ses enjeux et par le développement d’un numérique ouvert, pensé comme un commun' ». Un objectif que se traduit par plusieurs actions :

  • Être un opérateur de soutien aux communautés (Catalyst, Hauts tiers lieux, Assemblées des communs, Chambre des communs, Open Source Ecology Lille, etc..) et plateformes ouvertes de l’innovation sociale à l’ère du numérique.
  • Permettre l’organisation de rencontres pour diffuser les travaux sur les sujets d’innovation sociale et numérique au grand public.
  • Constituer un espace pour fluidifier le dialogue autour des enjeux numériques avec l’acteur public.

Une nouvelle page « Contribuer » a vu le jour sur le site de l’ANIS, qui liste l’ensemble des actions auxquelles chacun peut participer, et qui permet de petit à petit devenir membre actif de l’association. En activant ce type d’espaces contributifs en ligne, l’association souhaite que chaque communauté, acteur, collectivité qui aujourd’hui bénéficie des actions de l’ANIS puisse s’inviter à contribuer au projet de l’ANIS.

Ce nouveau projet pour l’ANIS a été acté par une assemblée générale en février 2017. Il s’est traduit par renouvellement de bureau et une redistribution de la gestion de l’association à ses membres actifs. Christian Mahieu et Marion Rousseaux sont devenus les nouveaux co-présidents de l’association.

Cette évolution de l’association sera l’occasion d’appliquer en partie les résultats des travaux de recherche de Catalyst. La distinction entre les 2 projets persiste, mais avec une plus forte perméabilité d’ANIS aux innovations de gouvernance et d’organisation amenés par Catalyst. Les questions de médiation numérique et d’articulation avec les acteurs de l’éducation populaire restent néanmoins d’actualité.

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